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de la sincérité intempestive, la rage de crier à la face de l’univers des vérités dangereuses et désobligeantes, la folie de gâcher une vie, plusieurs vies, par scrupule moral, au nom d’un principe, — tout ça, c’était des idées de gens du Nord, des inventions ibséniennes !… Le sentimental Angelo avait le sens du relatif. Il savait qu’en ce monde les pauvres créatures pécheresses font ce qu’elles peuvent et non pas ce qu’elles voudraient faire…

Salvatore, témoin discret des amours fraternelles, se réjouissait en son cœur que madame Van Coppenolle eût sauvé Marie Laubespin de l’irrésistible Angelo. Isabelle lui devenait sympathique comme une belle-sœur, et il ne pensait pas à blâmer ces deux beaux jeunes gens qui ne faisaient de mal à personne en se faisant l’un à l’autre tant de plaisir… Salvatore, le plus honnête et le meilleur des hommes, ne mêlait pas les choses de la morale aux choses de l’amour.

Il avait remarqué la tristesse de madame Laubespin et il faisait parfois des allusions timides à la peine qu’il souhaitait consoler. Un jour, après avoir lu des lettres de France, Marie, seule au jardin avec Salvatore, céda au besoin de confidence qui tourmentait son cœur solitaire. Encouragée par le bon regard, le sourire affectueux du sculpteur, elle raconta l’histoire de son amour. Elle trouva, pour dépeindre Claude, des mots