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heure à la paresse napolitaine ; mais, l’heure écoulée, il donnait le signal… Et l’on retournait aux ruines.

Quelquefois, en passant à la porte Stabienne, on appelait M. Spaniello qui habitait un villino blotti contre le rempart. Angelo s’en allait seul par les rues déjà tièdes. Il s’arrêtait devant toutes les maisons fameuses, devant tous les jardinets où M. Spaniello avait replanté, dans les trous authentiques, les oléandres et les violettes, le lierre et l’iris ; il causait avec tous les gardiens, et, quand des touristes passaient, les étrangères un peu jolies apprenaient ce qu’est l’œillade napolitaine, le regard de velours noir qui glisse de côté, entre les cils, et qui appuie, qui insiste, qui dit : « Je voudrais bien… » et quelquefois : « Voulez-vous ?… »

Il rêvait à des aventures… Souvent, il entrait dans la baraque où le placide Gramegna construisait des villas romaines, hautes de quinze centimètres, en cire, en plâtre, en bois, et si complètes que pas un chapiteau, pas une brique, pas une dalle, pas un morceau de mur en faux marbre — troisième style ! — du modèle original, ne manquait à la copie… Gramegna était ravi de voir Angelo, mais il n’avait rien à lui dire, excepté les accidents survenus à telle colonnade, fabriquée avec de petits morceaux d’os, à tel