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petite rue, verte d’herbe, sonore de cloches, garde un air ancien, tranquille et dévot. Épargnée par les « embellisseurs » et par les industriels de Pont-sur-Deule, avec ses vieilles façades de brique, avec ses vieux toits pourpres ou bleus, elle a conservé son nom du Moyen âge, son nom légendaire et parfumé : « Rue au Chapel-de-roses ».

Un après-midi de novembre, le bruit d’une porte qu’on ferme, le bruit d’un pas sur les pavés, éveillent la petite rue assoupie. Mademoiselle Broquette, la mercière, lance un coup d’œil furtif entre les bonnets ruches, les journaux et les cartes postales qui ornent la vitrine de son magasin. Au premier étage d’une maison, un store à franges se soulève. Mademoiselle Hautremont, la vieille infirme, regarde dans le miroir-espion suspendu à sa fenêtre… Et chacune pense :

« Il y a quelque chose de nouveau chez les Wallers. »

Tous les jours, par tous les temps, à six heures précises, M. Guillaume Wallers, l’archéologue, sort de son logis pour une promenade apéritive. On sait qu’il va suivre le petit quai du canal jusqu’à la rue du Port ; qu’il s’arrêtera au café Belle-Fleur, place de l’Homme-sans-tête, et