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assises, où Salvatore di Toma ne parût, mêlé à la foule, et dessinant, dessinant, sur un petit album de toile grise.

La racaille napolitaine, fière de lui, l’adorait, le revendiquait pour sien. On le montrait aux enfants. On l’appelait, familièrement : « Tore !… Notre Tore !… » Et par impossible, s’il avait eu un ennemi, vingt bons garçons l’en eussent débarrassé gratuitement, par sympathie…


Il pria Marie de choisir une des statuettes. Elle prit la Fille abandonnée, maigre, serrée dans un petit châle, chancelante sous le poids léger du nourrisson qu’elle emporte à l’hôpital des Enfants trouvés.

— Que cela est triste ! dit Angelo… Et quelle compagnie pour une jeune dame, cette drôlesse et son avorton !…

— Allons, Gramegna, donne les verres, le marsala, les douceurs… Et toi, Santaspina, au piano. Il faut rappeler le doux rire sur le visage pensif de madame Marie…

Preste, il remplissait les verres, et Salvatore, gauchement, offrait à Marie les gâteaux feuilletés. Elle se laissait servir, accoutumée déjà à la gentillesse familière de ses hôtes.

Salvatore avait conquis son estime, et un peu de son amitié. Quant à l’autre, c’était, pensait-