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meubles, et Marie l’aima en souvenir du sien.

Trois hommes, assis sur des chaises de paille, causaient, dans la fumée des cigarettes. Salvatore les présenta : le comte Arfano, l’ami Gramegna, et Felice Santaspina, maître de musique.

Le comte Arfano, sec comme un Arabe, l’œil aigu et la main fine, parlait français et même parisien, tandis que l’ami Gramegna, blondasse et pâle, avec de grosses lèvres, commençait des phrases pénibles qu’il achevait toujours par un geste. Et le maître de musique, tout noir, les poignets velus, les cheveux plantés bas sur le front, bas sur la nuque, roulait des yeux de charbon et ne soufflait mot.

Marie, intimidée, s’assit dans l’unique fauteuil et pria ces messieurs de ne pas jeter leurs cigarettes. Ils la regardaient avec cette curiosité caressante des méridionaux qui paraissent toujours un peu amoureux de toute femme jolie. Et le comte Arfano se mit à parler des Françaises. Il vanta leur élégance spirituelle, leur grâce « plus belle que la beauté », leur habileté merveilleuse à mettre en valeur tel ou tel détail de leur personne, l’heureuse légèreté de leur caractère qui les défend des passions vives et les conserve jeunes jusqu’à cinquante ans.

Il traçait ainsi l’image de la mondaine égoïste, intelligente et capricieuse, peu de chair dans