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un fond rougeâtre. Les pluies de nombreux hivers avaient lézardé les plâtres et décoloré les stucs. Une famille, redoutablement prolifique, transformait le premier étage en lapinière et décorait les fenêtres de paillasses à carreaux, de torchons sales, de langes malodorants et de bas rayés jaune et vert. Les piailleries des enfants ne gênaient pas Salvatore qui avait transformé en atelier le rez-de-chaussée de la maison. Il y venait aisément de Naples, par le tramway du Pausilippe.

Angelo et Marie traversèrent le jardin, et le jeune homme se mit à crier :

— Oi !… Tore !… Tore !

Une voix répondit, de l’intérieur :

— Angè !…

Et la porte s’ouvrit, et Salvatore parut, en blouse d’atelier, les mains grasses de terre.

— Donna Maria ! — Il appelait parfois la jeune femme par son prénom, à la mode napolitaine.

— Donna Maria ! vous êtes venue aussi !… Vous excuserez la pauvreté du logis, la simplicité de la réception ? Vous êtes une artiste, et cela me met à l’aise, car les artistes de tous les pays, n’est-ce pas, forment une seule famille…

— Vous me faites bien de l’honneur, dit Marie.

La simplicité de Salvatore lui plaisait infini-