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travers le salon vide, le cœur serré, évoquant le souvenir du premier soir où j’avais vu Lauten debout près d’Hélène, avec ses cheveux blonds, ses yeux froids, son profil aux lignes sévères et sa haute taille qui nous dominait tous. Et comme je frissonnais sous l’égoïste angoisse qui étreint la vie devant la mort, j’aperçus Hélène dans l’encadrement d’une portière soulevée.

Elle vint à moi et me prit la main.

Ses yeux brillaient d’un feu sec, dans la lividité de son visage ravagé par la douleur. Elle n’avait plus ni beauté ni jeunesse. Ses cheveux relevés en hâte, sa robe froissée, ses gestes fébriles racontaient des heures terribles, des heures d’agonie où les cris et les larmes s’étouffent dans les oreillers, derrière les rideaux tirés et les portes closes.

Elle me regarda fixement.

J’eus le pressentiment tragique de la vérité…

— Vous savez ?… dit-elle.

J’inclinai la tête ; elle lâcha ma main, tomba dans un fauteuil, et, dans un flot de larmes,