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d’elle le double mystère de l’amour et de la nuit.

— « J’entends le cor ! » dit Brangaine. — « Non, répond Yseult, l’effroi t’égare… C’est le vent de la nuit, messager des amours… La nuit sera trop courte, Brangaine ! Ne retarde pas ma joie ! Rends-moi le bien-aimé de mon cœur ! »

Sous les doigts de Lauten, l’une après l’autre, se déroulaient les phrases de tendresse et de rêve où éclataient des cris d’amour. Attentif, je me rapprochai en silence. Soudain, je vis Hélène, à quelques pas de moi, debout contre la table à thé, enivrée aussi par cette musique.

Elle ne regardait ni moi, ni Lauten, ni personne ; elle était transfigurée par une de ces expressions passagères que j’attribuais uniquement à l’émotion enthousiaste de l’art ; et, cependant, il y avait dans ses yeux un secret doux et terrible…

Ils s’ouvraient, fixes et profonds, ces beaux yeux impénétrables, ces beaux yeux pareils à des lacs remués reflétant un ciel d’orage. Oh !