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passer dans sa voix, son goût presque maladif pour les seules jouissances esthétiques.

Peut-être se trompait-elle en se disant incapable d’aimer ; peut-être l’heure de la passion devait-elle sonner dans sa vie ; peut-être plus clairvoyante, trop clairvoyante, mesurait-elle l’abîme qui sépare le rêve de la réalité, l’hymen mystique des âmes de la complète étreinte des amants ; peut-être était-elle uniquement une cérébrale, une créature inachevée sous la splendeur extérieure de sa forme, chaste sans désirs, sans efforts, sans mérite ; peut-être, très tendre mais très pure, avait-elle bravement renoncé à l’amour et, par un scrupule de pudeur, en repoussait-elle l’image, obstinée dans une incrédulité volontaire où je découvrais de la prudence et de l’orgueil.

Je m’arrêtai à cette dernière hypothèse.