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sous les verts éventails des fougères. Morbrandt m’avait nommé tous ceux qui se réunissaient chaque jeudi dans cette maison hospitalière, vrai petit temple de la Musique, dont madame Beauchamp était la grande prêtresse. Je savais rencontrer là Clément Holler, le sculpteur ; Deschamps, le romancier, Hervigny, le poète, et quelques-uns de ces rares hommes du monde, artistes de race, qui forcent la sympathie des professionnels.

Deux femmes, différentes par l’âge, le caractère et la beauté, égayaient ce petit cercle et mêlaient aux discussions abstraites et techniques la grâce légère de leurs propos ; la maîtresse du logis m’attirait surtout, par sa beauté fine, son goût délicat des arts et l’intelligente indulgence qui la rendait chère à Morbrandt.

Elle était, disait-il, bienveillante sans effort et trop juste pour tomber dans cet excès de malice parfois involontaire qui donne aux saillies des femmes très spirituelles une nuance de cruauté.