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hâtaient leur fuite oblique, et des crevettes transparentes sautaient par bonds éperdus.

La jeune femme suivait lentement la jetée sous le soleil écrasant de onze heures, regardant le donjon du fort abandonné. Quand elle fut au bas de l’escalier que les eaux couvrent à marée haute, elle hésita un instant. Puis elle se mit à gravir les marches glissantes, s’aidant de son ombrelle, la sueur au front.

En haut, la première porte franchie, elle se trouva sur une plate-forme entourée de murailles. Une maison de garde, au centre de la cour, montrait ses vitres crevées, ses corridors ouverts, ses chambres où les araignées de l’oubli éternisaient leur labeur mélancolique. Le gazon avait poussé partout, un haut gazon déjà brûlé, étoile de fleurettes jaunes. Des meurtrières révélaient par leurs fentes le bleu vibrant de la mer et Marthe crut entrer dans le château du Silence.

Elle s’assit sur une pierre. Nul regard ne pesait sur elle. Les oiseaux marins, croisant dans le lumineux espace, au-dessus de sa tête,