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des yeux voilés vers celui qui parlait encore en suppliant quand il agissait en maître :

— Vous me demandez… ce que je ne puis dire… Je vous aime… je vous aime trop… Allez-vous-en…

— Tu m’aimes ! dit-il ; — et le tutoiement les fit frémir tous deux, comme une caresse — tu m’aimes et tu me chasses quand nous pourrions nous endormir dans le délice unique que nous ne connaîtrons plus… Cette nuit… Cette seule nuit… toi contre moi… les ténèbres, le silence… Ah ! pense à la joie de nous aimer ! car tu brûles comme moi, tu trembles comme moi, tu me veux comme je te veux… Marthe, tes yeux consentent, Marthe, je t’aime et je te prends et tu te donnes, Marthe, tu es à moi.

Elle jeta un dernier cri :

— Allez-vous-en.

Un baiser lui ferma la bouche. La triple ivresse de la solitude, du silence, du baiser prolongé cœur contre cœur, fit courir dans les veines de Jean les ondes d’une volupté brûlante. Marthe, une fois encore, essaya de se