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raient les fenêtres, sous l’auvent de ces jolis toits, et ressemblaient à des bandes découpées dans une vieille toile de Perse.

» Flânant, songeant, j’errais par les rues proprettes où les « friseurs » alternent avec des confiseurs et des charcutiers. J’admirai la petite place du Tilleul, les fontaines charmantes, le Rathaus peint à fresques et orné de sirènes symboliques. Cependant l’éclat du ciel s’était assombri, et j’allais regagner mon hôtel, quand je passai, une seconde ou troisième fois, devant le porche de la cathédrale.

» Un autre voyageur s’était arrêté là. Il prenait congé du gros sacristain glabre qui lui avait fait visiter l’église, et je reconnus à son accent qu’il était Français. Lentement, il faisait le tour du porche, examinant les figures sculptées et les vierges sages et les vierges folles, l’Ève nue, les Vertus aux tempes larges, au sourire retroussé, dont les yeux expriment une malice équivoque ou une naïveté joyeuse. Parmi ces statuettes, sœurs des statues de Bâle ou de Strasbourg, le « Prince du monde » paraissait dans sa gloire, jeune, beau, voluptueux. Indifférent aux vipères secrètes qui lui