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le mystère. Elles sont crédules et respectueuses, parce qu’elles sont des êtres intuitifs, qui sentent au lieu de comprendre. Leurs sens, affinés peut-être par les misères physiologiques et les tares mêmes du sexe, perçoivent, comme les sens des bêtes, certains avertissements, certains contacts de l’Inconnu ; chacune détient en elle un peu de la puissance sibylline, et leurs corps, leurs âmes passives, sont des logis hantés où règnent des forces ennemies.

Des grenouilles coassaient au loin. L’odeur de la rivière affadissait la nuit trop douce, et la lune, tapie au ras des berges, entre les roseaux, était toute ronde et dorée comme un gros œil de rainette… Parfois, un long météore verdâtre filait au ciel, et tombait derrière l’horizon, en silence…

— J’avais un ami, dit M. de Cormières. Il se nommait Gérard Franckel… En prononçant son nom, je le revois : Un jeune homme blond, tout en nerfs, avec une jolie pâleur, une bouche fine et sérieuse, et des yeux qui n’avaient pas de nuance précise, qui paraissaient vides à force d’être clairs. Son âme était, comme ses yeux, transparente et sans fond, ne reflétant