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tion pour eux était forcément conventionnelle, et madame Cheverny s’en plaignait quelquefois, un peu jalouse des Lebon.

Un jour, elle était assise dans le salon du notaire, seule avec l’enfant, qu’elle tenait sur ses genoux. C’était en juin. Elle avait une robe de mousseline et un chapeau de paille rude où tremblaient de petits bouquets rouges et noirs, — grappes de groseilles et de cassis. — Ses cheveux châtains, qui avaient dû être blonds, naguère, frisaient et se doraient, quand elle tournait la tête et que le rayon vaporeux, glissant entre les volets mi-clos, l’effleurait.

Les iris larges de ses yeux, dans l’ombre, prenaient aussi une couleur d’or. Des bagues brillaient à ses doigts… Elle avait l’air d’une grande petite fille, et elle était pourtant quelque chose de lointain, de supérieur, de mystérieux, — une espèce de reine… L’enfant, qui l’avait vue tant de fois, découvrait en elle un charme que les autres dames et même la tante chérie ne possédaient point… un charme qu’on respirait sur elle, comme le parfum de sa robe, comme le parfum de sa peau… Et, parce qu’elle avait ce charme, que les hommes subissent et