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Hellé

livre tout brûlant de sa foi, tout vibrant de sa souffrance, tout attendri de sa pitié ! Elle appelait mon âme, elle l’exhortait vers les hautes régions éblouissantes où l’amour humain, au-dessus des égoïsmes, des vanités, des voluptés, monte, s’élargit, s’illumine et plane dans l’éternel.


XXIX


Quand j’arrivai à la porte de la mairie, j’aperçus l’affiche qui portait en grosses lettres ces mots : Auditions et Conférences populaires. Depuis que j’étais revenue à Paris, — depuis trois jours, — j’avais médité cette escapade accomplie à l’insu de tous, dans le lointain faubourg où je ne connaissais personne. Partagée entre des sentiments contradictoires, je n’avais pas osé me présenter chez Antoine, ni lui écrire, et je mourais du désir de le revoir.

Vêtue d’une robe sombre, enveloppée d’une pelisse qui dissimulait ma taille, d’une voilette qui dissimulait mes traits, je devais ressembler à quelque pauvre institutrice, venue pour chercher un divertissement utile et gratuit. Des gens entraient sous le péristyle de la mairie. Je les suivis, à tout hasard.



VÊTUE D’UNE ROBE SOMBRE…

Je me trouvai bientôt dans une grande salle nue, qui avait l’aspect d’une salle d’école avec ses chaises de paille et ses rangées de bancs. Au fond, le buste en plâtre de la République dominait une petite estrade. Cette estrade supportait un piano droit, deux pupitres à musique, une table couverte d’un tapis vert. Une demi-douzaine de jeunes gens et deux femmes occupaient les chaises, et je compris que c’étaient des artistes improvisés qui s’employaient à instruire