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avant l’amour

se gargarisaient de vocalises, à la grande admiration de l’auditoire composé de ces riches bourgeois qui aiment le café-concert, le couplet égrillard, la littérature sentimentale et la peinture bien finie.

— Quel malheur ! disait madame Gannerault, Marianne, avec sa jolie voix — un contralto étonnant ! — Marianne n’aime pas la musique.

Assurément je n’aimais point cette musique qui ravissait ma marraine et mon tuteur. Mon culte allait à Beethoven que je connaissais peu, remontait à Haydn, à Rameau, à Lulli même. J’ignorais complètement les maîtres modernes, Schumann, Wagner, Berlioz, que je devais tant aimer.

Le concert était presque terminé quand madame Gannerault, traînant sa longue robe de velours noir, fit un petit geste qui commandait le silence.

— Mesdames, dit-elle en promenant sur ses élèves et amies le bienveillant regard du professeur satisfait, une surprise charmante nous