Page:Tinayre - Avant l amour.pdf/54

Cette page a été validée par deux contributeurs.
41
avant l’amour

mon lit et qui semblait me reprocher mon souci profane de la beauté et de l’amour. Dire que j’avais été si pieuse et que j’étais devenue si indifférente — presque aussi tiède qu’au lendemain de ma première communion…

Elles ressuscitaient, les heures mornes, les lentes années d’adolescence… À quinze ans, après avoir quitté la pension de madame Dumarquet, j’avais commencé ma vie de jeune fille. Maxime, devenu secrétaire intime d’un diplomate connu, voyageait en Russie et en Allemagne. Ma marraine était toute à ses leçons, à ses visites, à ses plaisirs, et mon parrain, qui vieillissait rapidement, s’enterrait dans ses livres. En vain, pour compléter mes études, il m’ordonnait des lectures dont je devais écrire le commentaire, excellent exercice qui m’a permis d’étudier et de formuler mes impressions. En vain le piano, le chant, le dessin se partageaient mes journées. Dans ce vaste appartement que la mélancolie et le désordre habitaient, je ne me sentais pas vivre. Ma fenêtre ouvrait sur un confus horizon de jardins et de