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avant l’amour

Ton mari ne nous fera pas la blague de nous surprendre.

— Ah ! le pauvre homme, il est loin.

Elle lui offrit sa bouche… Je me rejetai dans la salle à manger.

Mon cœur battait. Il me semblait que j’étais témoin et complice d’un crime. Certes, je ne comprenais qu’à demi jusqu’à quel point pouvaient être coupables ces deux êtres que j’avais surpris enlacés. Mais ce baiser, ce tutoiement… Je sentais, avertie par l’instinct naissant de la femme, qu’ils faisaient ou voulaient faire quelque chose de mal.

Ma marraine me trouva fort pâle quand elle revint. L’émotion, la fatigue, le jeûne de la matinée expliquèrent mon malaise. Nous reprîmes le chemin de l’église.

Si pendant la messe j’avais péché par involontaire froideur, je péchai par indifférence aux vêpres de l’après-midi. J’avais souvent ouï dire que l’avenir de toute une vie dépendait de la première communion, et je m’attristai de ma propre frigidité. J’avais beau m’éver-