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avant l’amour

m’échappais toujours et je m’enivrais dans la fureur de la poursuite stérile… Oh ! je ne voulais pas de toi que ta chair !… je rêvais de te conquérir toute, car — c’est ma fierté et ma seule excuse — ta possession sans ton amour ne me suffisait pas.

Chère, chère bien-aimée, j’aurais pu commettre un crime que tes imprudences, aux yeux du monde, eussent excusé. Je n’ai rien tenté contre ta liberté et ta faiblesse, n’appréciant que le don conscient et consenti… Tu t’es éloignée ; je t’ai crue perdue… Et soudain tu es venue à moi avec des baisers et des paroles qui furent la douce promesse de l’amour.

C’est que nous étions de la même race, égarés dans des voies différentes, mais pareils par la révolte de nos cœurs et l’âpreté de nos vouloirs. Et si nos réticences et nos résistances nous ont si longtemps exaspérés, c’est que l’amour s’ébauche par des désordres et des heurts avant de s’achever en harmonie… Rappelle-toi ces phrases de sourde inimitié, nos