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personne ne semble voir, j’apprends à connaître un nouvel aspect de la famille.

Ces scènes instructives se renouvelèrent souvent pendant les années qui suivirent. Maxime, bachelier, fit son volontariat d’un an, puis prépara sa licence en droit. Je grandissais sans qu’il parût s’intéresser à la gamine brune et pensive qui tenait si peu de place dans la maison. Parfois, accompagnée de la bonne, je le rencontrais dans les allées du Luxembourg. S’il était seul, il me donnait un baiser froid : « Tu vas bien, petite ? » Là se bornaient nos effusions. L’intimité s’arrêtait au tutoiement, à certaines formes du sans-gêne, sans comporter le moindre échange d’affection. Je ne me rappelle aucune circonstance de ma vie où Maxime ait pris un rôle intéressant.

Aussi je l’aimais peu, ce garçon hautain, concentré et sarcastique, et je devinais qu’il flattait l’orgueil de ses parents, sans satisfaire leur tendresse. Il semblait incapable d’émotion. Personne ne pouvait dire l’avoir vu pleurer. Épris d’un petit livre qu’il relisait sans cesse