Page:Tinayre - Avant l amour.pdf/272

Cette page a été validée par deux contributeurs.
259
avant l’amour

me rendis au lieu fixé pour le rendez-vous. Maxime savait que je donnais une leçon tous les vendredis, avenue Duquesne. Il avait prévu pour moi quelques heures de liberté qu’un facile prétexte justifierait sans peine aux yeux de ses parents. Quatre heures sonnaient quand je débouchai sur la place des Invalides. Ah ! le morne, l’horrible jour de novembre, le ciel de brouillard, la pluie invisible, le sol détrempé, la funèbre majesté du monument derrière les hautes grilles… Le froid me pénétrait ; l’anxiété me poignait le cœur… Soudain, une voiture s’arrêta. Maxime, penché, me fit signe :

— Monte, dit-il, nous avons à causer.

Le fiacre partit. Assis l’un près de l’autre, sans un baiser de bienvenue, sans une pression des mains, nous nous regardâmes comme pour surprendre nos pensées. Maxime déclara :

— Je devine tout ce que tu ne me diras pas. Tu es venue remplie d’indignation, de remords, d’hypocrisie vertueuse. Je suis un fils dénaturé,