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avant l’amour

— Viens, Marianne. Je suis contente !

Madeleine Larcy, rayonnante, me sauta au cou, puis, me séparant de Montauzat, m’en traîna vers un joli garçon brun, myope, taillé sur l’uniforme patron des fiancés bien élevés et suffisamment épris. Madame Larcy exultait, louant les diamants de la bague et les qualités de cœur du futur gendre.

— Cent mille francs et les espérances, murmurait-elle à l’oreille de ma marraine… Villa à Houlgate… tante octogénaire… capacités supérieures… sera député un jour.

Je regardais les fiancés… S’il était banal, elle était exquise et vraiment amoureuse, de ce gentil petit amour de demoiselle qui attend pour se déclarer la permission des parents, la certitude d’une fin légitime avec soirée, contrat, bal et grand’messe au flamboiement des cierges bien payés… L’âme étroite de Madeleine était comblée… Mon âme, élargie par d’immenses désirs, souffrait le tourment d’être vide… Élans avortés, aspirations confuses, volonté d’embrasser le bonheur sous toutes ses formes fuyantes, rêve