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avant l’amour

colchiques mauves et de soucis sauvages d’un or violent, presque orangé. Mêlée à l’odeur des chèvrefeuilles, montait l’odeur aromatique du regain. Étroit paysage fermé par les saules, les murs des fermes, la côte à pic, site familier qui reposait nos âmes de l’inquiétude des grands horizons.

Maxime, par ces matins charmants, me raconta longuement sa vie. J’appris qu’il avait aimé une femme dont il était encore aimé. Le nom de madame de Charny s’imposa à ma pensée. Le jeune homme ne me détrompa point. Je connus peu à peu les détails lamentables de cette histoire, la catastrophe d’un flagrant délit qui avait brisé la carrière de Maxime, la fuite de sa maîtresse, sommée par le mari de disparaître sans scandale. Riche, déjà mûre, elle vivait seule aux environs de Paris. J’imaginai entre eux une passion romanesque et exaltée. Plus expérimentée, j’aurais deviné la misère d’une liaison devenue une chaîne que la femme, âpre à l’amour, alourdissait sur l’amant trop jeune.