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Et malgré qu’à notre appel, Dieu n’ait jamais répondu, le doute est si cruel, la science est si sotte et l’amour est si vain, que nous envions la mort des martyrs : ils n’ont vu du ciel « que ce qu’il a de bleu, » et nous voudrions leur acheter leur foi, fût-ce au prix de leurs tortures. Au moins, conclut le poète, faisant effort pour s’arracher au pessimisme de Vigny :

Si nous n’aimons plus rien, pas même nos jeunesses,
Si nos cœurs sont remplis d’inutiles tristesses,
S’il ne nous reste rien ni des Dieux, ni des Rois,
Comme un dernier flambeau gardons au moins la Croix.

Voilà les derniers vers, les derniers beaux vers du livre[1]. On le voit, la réponse chré-

  1. Il est très curieux à étudier, ce livre rarissime. Le plus curieux, c’est que le seul vrai cri de foi de Villiers ait jeté soit en l’honneur de la Patrie, en réponse à des toasts et à des journaux d’Angleterre (Juillet 1858.)

    Anglais, vous avez fait des choses méprisables ;
    Vous avez insulté par des mots flétrissantes
    Un drapeau devant qui vous avez tremblé tous !
    Tenez en vérité ces choses-là pour lâches ;
    Fouillez ces nobles plis pour y chercher des taches,
              Vous n’y trouverez que des trous !

    Ces strophes et les suivantes, qui sont bien les plus mauvaises du volume, n’en sont pas moins d’un patriote et vibrent de sincérité. Il est vrai que, quelques mois plus tard, au moment de livrer à l’impression ce poème patriotique, Villiers eut comme une pudeur de son chauvinisme ou peut-être un regret de cette amplification de rhétoricien. Le sceptique ou le critique qui était en lui, s’en tira par une plaisanterie : le poème est intitulé ironiquement : Une façon d’imiter M. de Pompignan. Toujours est-il qu’on ne trouverait pas dans ce livre une ode plus enthousiaste, un hymne plus chaleureux, ni un poème plus creux.