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à Olympie, à Delphes, sur l’isthme, à Athènes, dans la citadelle, à Lacédémone, dans l’Amyclée.

« Si l’une ou l’autre des parties contractantes a oublié quelque point, ou si elles désirent, pour de justes raisons, faire quelques changemens aux points convenus, elles le pourront l’une et l’autre sans manquer au serment, quand elles en seront tombées mutuellement d’accord.

XIX. La ratification du traité fut présidée par l’éphore Plistolas, le quatrième jour avant la fin du mois artémisium, et à Athènes par l’archonte Alcée, le sixième jour avant la fin du mois élaphébolion. Ceux qui prêtèrent le serment, et remplirent les rites sacrés, furent, de la part des Lacédémoniens, Plistolas, Damagète, Chionis, Métagénas, Achante, Daïthus, Ischagoras, Philocharidas, Zeuxidas, Anthippe, Tellis, Alcinidas, Empédias, Ménas, et Lamphile ; et de la part des Athéniens, Lampon, Isthmionique, Nicias, Lachès, Euthydème, Proclès, Pythodore, Agnon, Myrtile, Thrasyclès, Théagène, Aristocœte, Iolcius, Timocrate, Léon, Lamachus, Démosthène.

XX. Cette trêve fut conclue à la fin de l’hiver[1], lorsqu’on entrait déjà dans le printemps, aussitôt après les fêtes de Bacchus qui se célèbrent dans la ville, dix ans accomplis, et quelques jours après la première invasion de l’Attique et le commencement de cette guerre. Il faut plutôt avoir égard à l’ordre des temps qu’aux magistrats qui ont rempli quelque part la dignité d’archonte ou quelques autres charges, et dont les noms servent à désigner les époques des événemens ; car on ne voit pas exactement si une chose est arrivée au commencement ou au milieu de leur magistrature, et comment elle y coïncide ; au lieu que si l’on compte, comme j’ai fait, par hiver et par été, ou verra qu’en supputant ces deux moitiés d’année qui forment une année entière, cette première guerre a duré dix étés et autant d’hivers.

XXI. Les Lacédémoniens (car c’était eux qui devaient les premiers rendre ce qu’ils avaient), renvoyèrent sans délai les prisonniers qui étaient entre leurs mains. Ils firent passer en Thrace Ischagoras, Ménas et Philocharidas, avec un ordre pour Cléaridas de remettre Amphipolis aux Athéniens, et pour les autres commandans d’accepter la trêve, en se conformant aux articles qui les concernaient en particulier ; mais ils trouvèrent le traité désavantageux, et ne s’y soumirent pas. Cléaridas ne restitua pas non plus Amphipolis : il agissait par complaisance pour les Chalcidiens ; mais il donnait pour raison qu’il n’était pas en son pouvoir de la rendre malgré eux. Lui-même se hâta de partir avec les députés de la Chalcidique, pour faire à Lacédémone l’apologie de sa conduite, s’il arrivait qu’Ischagoras et ses collègues l’accusassent de désobéissance ; il voulait en même temps savoir si l’on ne pouvait pas encore faire des changemens au traité. Il le trouva ratifié, et repartit aussitôt, envoyé de nouveau par les Lacédémoniens, qui lui prescrivirent surtout de restituer la place, ou sinon d’en retirer tout ce qui s’y trouvait de Péloponnésiens.

XXII. Les Lacédémoniens engagèrent ceux des alliés qui se trouvaient à Lacédémone, et qui n’avaient pas reçu la trêve, à l’accepter ; mais ceux-ci continuaient de donner les mêmes prétextes sur lesquels ils l’avaient rejetée, et disaient qu’ils ne s’y soumettraient pas qu’on n’en eût rendu les conditions plus justes. Les Lacédémoniens ne pouvant se faire écouter, les renvoyèrent, et firent eux-mêmes avec Athènes une alliance particulière, persuadés que les Argiens qui, par l’organe d’Ampélidas et de Lichas, venus de leur part, refusaient de traiter, ne seraient pas fort redoutables pour eux, sans l’appui des Athéniens, et que le reste du Péloponnèse resterait tranquille. Car ce serait aux Athéniens que ceux d’Argos auraient recours, s’ils en avaient la liberté. Comme les députés d’Athènes se trouvaient à Lacédémone, on eut avec eux des conférences, et elles se terminèrent par un traité d’alliance qui fut confirmé sous la foi du serment. Voici comment il était conçu :

XXIII. « Les Lacédémoniens seront alliés d’Athènes pendant cinquante ans.

« Si des ennemis entrent sur le territoire de Lacédémone et y exercent des hostilités, les Athéniens y apporteront les secours les plus efficaces qu’il leur sera possible. Si les ennemis se retirent, après avoir ravagé la campagne, ils seront regardés comme ennemis de Lacédémone et d’Athènes ; les deux puissances leur feront la guerre, et ne leur accorderont la paix que d’un

  1. Onzième année de la guerre du Péloponnèse, troisième année de la quatre-vingt-neuvième olympiade, quatre cent vingt-deux ans avant l’ère vulgaire. 10 avril.