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pelait Phainis. Il y avait huit ans et demi que la guerre était commencée quand Chrysis prit la fuite. À la fin de cet été fut entièrement terminée la circonvallation de Scione. Les Athéniens laissèrent des troupes pour la garder et se retirèrent.

CXXXIV. L’hiver suivant[1], ils se tinrent en repos, ainsi que les Lacédémoniens, en observation de la trêve. Les Mantinéens et les Tégéates, avec leurs alliés respectifs, se livrèrent un combat à Laodicée dans l’Orestide, et la victoire fut indécise. Chacun des deux peuples enfonça l’aile qui lui était opposée : les uns et les autres dressèrent un trophée et envoyèrent les dépouilles à Delphes. Le carnage fut grand de part et d’autre. Le combat se soutenait avec égalité, quand le jour finit et le termina. Les Tégéates passèrent la nuit sur le champ de bataille, et dressèrent aussitôt ieur trophée : les Mantinéens se retirèrent à Boucolion, et ce ne fut qu’après leur retraite qu’ils élevèrent eux-mêmes un trophée devant celui des ennemis.

CXXXV. Brasidas, à la fin de l’hiver, lorsque déjà le printemps commençait[2] fit une tentative sur Potidée. Il arriva la nuit, et appliqua les échelles : jusque-là, on ne s’aperçut pas de son approche. Il avait saisi le moment où le soldat qui fait sa ronde avec une sonnette venait de passer, et où l’officier qui devait la remettre à un autre n’était pas encore arrivé[3]. Il trouva un endroit du rempart qui était dénué de gardes, et ce fut là qu’il planta les échelles ; mais il fut entendu avant d’avoir eu le temps de monter, et se retira promptement sans attendre le jour. L’hiver finit, et en même temps la neuvième année de la guerre que Thucydide a écrite.


LIVRE CINQUIÈME.


I. L’été suivant[4] fut rompue la trêve d’une année qui dura jusqu’à la solennité des jeux pythiens. Elle subsistait encore quand les Athéniens chassèrent de Délos les habitans. Il les regardaient, pour quelque ancienne faute, comme des hommes souillés et indignes d’être consacrés au dieu[5]. L’expulsion de ces infortunés leur semblait manquer à cette purification de l’île dont j’ai parlé plus haut, dans laquelle ils avaient cru devoir enlever les tombes des morts. Les Déliens s’établirent en Asie, à Atramyttium, qui leur fut donnée par Pharnace ; et où ils furent reçus à mesure qu’ils arrivaient.

II. Cléon, après la trêve[6], se fit donner ordre par les Athéniens de passer en Thrace sur trente vaisseaux, avec douze cents hoplites, trois cents hommes de cavalerie, et la plus grande partie des alliés. Il prit d’abord terre à Scione, dont le siège durait encore, en retira des hoplites qui étaient en garnison dans les murs de circonvallation. et cingla vers le port de Colophon. qui n’est pas fort éloigné de Toroné. Instruit par des transfuges que Brasidas n’était pas dans la place, et qu’elle ne renfermait pas de troupes en état de se défendre, il s’y rendit par terre avec son armée et envoya dix vaisseaux croiser devant le port. Il se présenta devant les premières murailles dont Brasidas avait enceint la place, à dessein d’y renfermer le faubourg et de ne faire qu’une seule ville, en abattant une partie de l’ancien mur.

  1. Après le 3 octobre.
  2. Avant le 29 mars.
  3. La ronde visitait les postes avec une sonnette, pour reconnaître si les sentinelles n’étaient pas eudormies Quand elle sonnait, il fallait que la sentinelle répondît.
  4. Dixième année de la guerre du Péloponnèse, deuxième année de la quatre-vingt-neuvième olympiade, quatre cent vingt-trois ans avant l’ère vulgaire. Entre le 29 mars et le 12 avril.
  5. La véritable cause de la haine des Athéniens contre les habitans de Délos, c’est que ceux-ci avaient contracté une alliance secrète avec les Lacédémoniens. Athènes chercha dans la religion un prétexte à sa vengeance politique. (Diod Sic, lib. xii.
  6. Après le 12 avril.