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c'est à dire, de seigneur & possesseur d'iceluy, par vendition, donation, eschange, mort & autres manieres, Dominum commutare. Cela est prins ainsi, parce que ce mot Main se prent auβi pour pouuoir, possession & tenuë, car on dit ie l'ay en main, c'est à dire, en ma puissance, tenuë & possession, tout ainsi que Manus en Latin, dont est fait manumittere, mettre hors de sa puissance, domaine, & possession, vn esclaue.

Auoir la main seure, tantost se prend pour ruer droict où est visé, comme, Cet arbalestrier a la main seure, Huic certa manus est, neque à scopo aberrans. B. ex Quintil. Et tantost pour estre loyal, comme, Ce seruiteur a la main seure, ou est seur de la main, Fut non est, Is est cui tutò rem credas. Et au contraire, Il n'est pas seur de la main, Fur est. La raison de cette seconde signification est que les larrons estoient appelez en Latin, Manuarij, disans auβi Manuare, pour desrober, combien que A. Gell. liur. xvi. chap. vii. blasme ces dictions de nouueauté és Mimes de Laberius ancien Poëte Latin. A ce fait cette autre maniere de parler, auoir les mains crochues, c. estre larron.

Se mettre és mains ou entre les mains de quelqu'vn, Sese illi permittere. Liu. lib. 23. Sese illi committere, & illius mandare fidei. Terent. Andr.

Prendre ses procez & affaires en main, Eius causas suscipere. Liu. lib. 23.

Venir aux mains, Conserere manus cum hoste. Liu. lib. 23. cominus pugnare. Venir alle mani. Ital.

A pleine main, Plena manu.

Estre prest & en main, Ad manum esse alicui.

De main en main, Tradere per manus, traditione accipere.

Faict de la main, Manufactus.

Fait de main de maistre, Opus artificiosum, Fabrefactum. Dont l'opposite est qui n'est fait de main de maistre, Opus rude, haud affabre factum, Impolitum, Infabrefactum.

Qui est fait de main, & non de nature, Factitius.

Esprouuer aucun de longue main, Lentè probare aliquem, multo vsu explorare.

Autant qu'on peut empoigner en la main, Manualis.

Toutes les choses sont remises en la main d'vn qui a toute puissance, Omnia ad vnius arbitrium sunt delata.

Aller à la main gauche. Læuam petere.

Assembler main à main, Manus manibus componere. Il se peut prendre pour ce qu'on dit militairement venir aux mains, & combatre main à main, qui est apres que tous les coups de traict sont passez. Ce que l'Italien dit, & Venir & essere alle mani, & menar le mani. Conserere manu, & manus conserere. Laquelle maniere de parler a esté auβi familiere aux Grecs. Herodot. liu. 3. όρέων δέ μιν άργόζ έπιζεώτα ό κορρύκε έζρετο, ότι ή χρήται τή χερσι. Pourquoy il ne frappoit de son espée. Et Appollon. lib. 2. Argonaut, χερσιν ένανλία χείραζ έωξε. La raison de telle maniere de parler est que les armes dont on combat de pres, & qui ne sont de coup volant, comme harquebouses, arbalestres, arcs, & semblables, sont demenées de la seule dexterité de la main. Auβi le mot Grec εγχιριδιον, formé de χείρ, qui signifie main, se prent pour espée, dague, & telle façon de glaiues. Herodot. lib. 3. Plutarch. In Numa & Camillo. A quoy semblent se conformer, & le nom de poignard, qui est formé de poing, parce que ceux qui le portent y ont communéement en parlant la main dessus (si on ne vouloit dire qu'il vint de poindre,) & le nom de Mandoussiane, qui est vne sorte de courte espée & large, & ces manieres de parler, venir l'espée au poing, mettre la main à l'espée, auoir bien les armes en la main, voyez Armes.

Auoir en main & prest, Habere in promptu, Sub manu habere.

Liures que i'ay entre mains, & que i'escri, Libri quos in manibus habeo, præ manibus.

Ayant sa main retirée & reculée en arriere, Retrorsa manu.

Qui n'a qu'vne main, Vnimanus, Manchus. Manchot.

Qui a cent mains, Centimanus.

Bailler la main, Dextram tendere. Qui est vne maniere de dire dont on vse quand vne femme mariée preste consentement pardeuant notaires pour l'alienation ou hypotheque d'vne chose où elle a droict, & se dit ainsi, parce que pour promettre auec ou sans serment, les parties mettoient la main dextre en celle desdits notaires, ainsi que aucuns l'vsent encore. Ainsi on dit la femme a baillé la main, Dextra data venditioni assentita est, Dare dexteram in id quod rogatur obligandæ fidei. La raison de telle maniere de parler peut estre prinse de ce que ceux qui requeroient instamment aucun de quelque grace leur empoignoient la main dextre, & que le requis octroyant ce dont il estoit supplié, pour seureté de promesse bailloit sa main dextre au requerant, comme le met Tite Liue au liure 30. en la requeste de Sophonisba au Roy Massinissa. Ou bien de ce que les rendus en bataille bailloient leur main dextre au vainqueur, pour signe de la foy de leur captiuité, laquelle estant prinse par le vainqueur, de là en auant estoient appelez Mancipes : C'est à dire prins par la main en droict de seruage. L'vsage est encore en cas de promesses en asseurer la foy & authorité par s'entrebailler les mains dextres. Et les cheualiers en deffis iettent le gantelet, de la main dextre pour gage de leur deffiance.

Bailler entre les mains d'autruy, Sequestra in manu dare, Sequestrare.

Bailler ses mains, confessant estre vaincu, Manus alicui dare. Cela se


vioit entre les peuples de iadis, dont les Romains auoient fait ces mots, vsitez entre eux, Manucapere, Mancupatio, Mancupium. Mais les François n'vsent de telle maniere de faire, ne de dire, combien que l'homme d'armes, singulierement les Princes estans contraincts de se rendre à l'ennemi, aient accoustumé de ietter ou bailler le gantelet de la main dextre, qui est le signe par lequel ils se rendent prisonniers de guerre.

Bailler par ses mains & de sa bourse, De domo vel ex arca numerare. Mais on dit, bailler ou receuoir par les mains d'vn quidam, Numerare aut accipere, opera ac interuentu cuiuspiam. Ce qui est vsité quand autre que le debiteur paye ce qui est deu.

Cheoir entre les mains d'aucun, Cadere in potestatem alicuius, In manus alicuius incidere.

Ils combatoient main à main, Cominus gladiis rem gerebant. Bud. ex Liuio.

Douleur de mains, Chiragra.

Escrire de sa propre main, Sua manu scribere.

Cedule escrite de la main propre, Chirographus.

Fermer la main, Pugnum facere.

Frapper des mains l'vne contre l'autre. Manus collidere.

Frapper les mains l'vne contre l'autre en signe que quelque chose nous plaist, & en donnant louange à aucun, Plaudere, Applodere, Complodere.

Le signe de frapper des mains l'vne contre l'autre en signe de ioye, Plausus, huius plausus.

Qui frappe des mains l'vne contre l'autre en signe de ioye & donnant louange, Plausor.

Garder ses mains de toucher à quelque chose, Manus comprimere.

Ce qui vient sans mains mettre, Aduentitius.

Ietter les mains sur quelqu'vn, Manus alicui intentare, Manus in aliquem iniicere.

Mettre la main à quelque chose, Manum alicui rei admouere.

Mettre la main à l'espée, Distringere gladium.

Mettre la main à la Republique, Capessere Rempublicam.

Mettre la main sur quelque chose, & s'en saisir, Manum iniicere alicui rei.

Mettre la main sur la bouche, Manum ad os referre.

Mettre la main sur quelqu'vn, & le battre, Manus alicui afferre.

Mettre tout entre les mains d'aucun, Omnia ad vnum referre.

Mettre les biens d'aucun en la main du Roy, ou de la communauté du peuple, Possessum publicè in bona alicuius mittere.

Quand on met la main à la besoigne, Actio.

Ie n'y mis iamais la main, Nunquam huic rei manum admoui.

Oster de ses mains, De manibus deponere.

Qui a autresfois passé sous la main du maistre, Politus è schola.

Prendre à la main, Manu tollere.

Prendre entre les mains & lire, In manus sumere.

Prendre par la main, Prehendere dextram.

En peu de temps il auoit reduit en sa main & l'homme & l'estat, Breui tempore totum hominem totámque eius præturam possederat.

Retenir & arrester la main de celuy qui s'efforce de desgainer, Gladium educere conantis morari manum.

Tendre la main, tantost se prend pour releuer ou retirer aucun d'vn mauuais passage, Opem alicui manus prehensione ferre. Et tantost pour demander l'aumosne, Assem rogare. Iuuenal. Manus extensione eleemosynam rogare.

Tenir la main à quelqu'vn en quelque affaire, est l'aider & fauoriser.

Toucher en la main d'vn autre, Dextras dare.

Ces liures-là ne tomberent iamais entre mes mains, Nunquam libri illi in manus meas inciderunt.

Toucher en la main d'aucun en signe d'accord, Dextram dextræ committere, Dare manum alicui.

Vendre par les mains des officiers, Per præconem vendere.

Venir és mains de son ennemi, Venire, vel Deuenire in manus inimici.

Venir entre les mains d'aucun, & en sa merci, Poni in potestate alicuius.

Ce qui leur venoit à main, Quod ad manum veniebat.

Mains croches, ou bien prenans, Manus inuolatrices. B.

Auoir en sa main, ou en sa puissance l'issue ou euenement des procez, Causarum fata regere. B.

Main ferme ne se prend pas seulement pour main asseurée, qui ne tremble ni ne varie point, Stata fixáque manus. Mais auβi pour la baillée d'vn heritage à vn fermier à certain temps & pris d'argent ou moison. Ainsi on dit, Il luy a baillé tels & tels heritages à main ferme, parce que le bailleur pendant le temps du bail par luy fait, ne peut sans conuention contraire, ou defaut se mouuant du fermier, tirer hors des mains d'iceluy les heritages ainsi baillez que dit est. Qui peut estre la cause que le preneur à main ferme porte le nom de Fermier, Locatio fundi, prædiorum rusticorum locatio.

Main se prend par metaphore pour vn instrument de fer à croc, auec lequel au combat naual on accroche le nauire de l'ennemi pour l'inuestir, & le happe l'on comme d'vne main, Harpago, qui est la cause que les pressu-