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dont iceluy Vegece fait mention audit lieu, ne se peut accommoder à cet instrument cy, & ne se trouue és autheurs Grecs, Ligula, Rudicula, Spatha, Spathula.

Espaue, Adespoton.

Espaues, Biens vacans, Bona adespota. B.

S’en aller de l’espaue & effreinte des chiens.

Espaule, f. penacut. Est le haut emplatement du bras, où est le porte-faix, Humerus, Armus, Scapula, duquel mot il est tiré. L’Espagnol dit Espalda, & l’Italien Spalla.

Porter sur ses espaules, Attollere humeris, Baiulare, Efferre in humeros. Et par metaphore, s’ennuyer & se sentir greué de quelqu’vn, comme, Il me semble que ie l’ay ou le porte sur mes espaules, Tam mihi taedio est, vt me humeris illum gestare putem. La raison de telle metaphore est, parce que le faix ennuye à la longue, ennuye & greue celuy qui le porte sur ses espaules.

Qui a les espaules basses, Demissis humeris homo.

Faire espaule à quelqu’vn, est phrase militaire, pour estre au secours d’iceluy, In subsidiis esse, Alicui subsidio praestò adesse.

Tenir espaule, & prester l’espaule, est le mesme que faire espaule, c. seconder aucun & le fortifier d’appuy. La metaphore est de ce qu’au poulser & heurter en auant, la principale force git aux espaules, pour laquelle és perfections d’vn bon homme d’armes, on met les espaules, & és oyseaux de proye, les maheutres, grosses, larges & esleuées.

Espaulées, f. penac. plur. num. Sont reprinses & boutées d’oeuure à faire, comme, Faire quelque chose par espaulées, ou par espauletées, c’est faire par boutées & par reposées, Nisu intermisso aliquid agere, Interrupta opera. Dont la phrase opposite est faire sans discontinuer, ou sans discontinuation, & tout d’vne haleine, & comme les practiciens disent sans se diuertir à autres actes.

Espauletées, f. penac. plur. num. Sont boutées & reprinses en faisant quelque chose par interualles & discontinuation, voyez Espaulées. Mais en fait de massonnerie, on dit reprendre ou refaire vn mur par espauletées, c. le refaire & repredre par parcelles sans l’abbatre. Ce que l’on fait és murs qui bouclent, Murum qui ventrem facit, Particulatim in integrum restituere. La raison de ceste phrase est parce qu’en le refaisant ainsi, il semble que le masson soustient le faiste auec ses espaules, à ce qu’il ne vienne à bas, quand il en redresse le milieu. Aussi en ce cas est il vsé du verbe Reprendre, qui est specificatif, & non du verbe Bastir, qui est du genre & vniuersel.

Espauliere, f. penac. Est imité du mot Italien Spalliera, & signifie cette façon de tapisserie d’vne ou deux aulnes de haut au plus, qu’on tend communémet en Italie aux sales & chambres és endroits où l’on s’assied, à ce que les habillemens ne se souïllent quand on s’y addosse. Aussi ce mot vient de Espaule, n’estant ceste maniere de tapisserie tendue qu’a la hauteur des espaules pour l’effect que nous venons de dire. Philippe Venuti le rend par Stragulum, vocable du genre. Mais Espauliere est nom specificatif, & au liure Rituum & cerimon. S. Rom. Eccl. est rendu par Postergale. au plus pres dudit mot Espauliere, s’il estoit bien Latin. Qui le diroit Stragulum humerale, ne seroit sans raison.

Espauler, Humerum luxare vel frangere.

Espaulé, Cui luxatus est humerus, vel loco motus vel fractus, Qui fregit humerum.

Espaulu, m. acut. Qui a hautes & grosses espaules, qui est l’vne des marques d’vn bon cheualier. Humerosus. l’Italien dit aussi Spalluto.

Espaulure, ou Espaulement, quand on se desboette, ou rompt l’espaule, Humeri luxatio, vel fractura, Humerus luxatus, vel loco motus, vel fractus.

Espeaultre, Vne espece de blé qu’on appelle ainsi, Zea, Semen. Les Italiens le nomment Spelta, & les Languedocs Speute.

Espece, Il vient de Species.

Vne espece de maladie, Genus morbi.

Par especial, Peculiariter, Speciatim, Specialiter.

Espée, Ensis, Spatha, en Grec xxxxx, dont il procede. L’Espagnol & l’Italien le retiennent plus en son entier, disans Spada, vsans de la consone moyene, ou moitoyenne (s’il se peut dire) qui est d, au lieu de la consone aspirée, qui est th. Duquel changement chascune desdites nations vse souuent, quad elle vse de quelque mot extrait ou du Grec ou du Latin.

¶ Espée aussi en cas d’equippage de pressoir, est vn baston rond du diametre de la mer, qui sert à mettre sur le marc pour soustenir les ais, & y en a deux, l’vn deuant & l’autre derriere.

Espée faée, Fatifer ensis.

Vne sorte de longue espée, Romphaea, Qui en aucunes contrées de France est appelée Verdun, en autres Estoc. Aussi plus propre est telle façon d’espée à estocquer qu’à frapper de taille. Et és lieux ou elle est appelée Estoc, si elle est plus courte & pour en combatre à cheual, est appelée par adionction Estoc d’armes. Telles espées sont forgées roides de pointe & de fort estoc. Dont estoit vsé mesmes aux guerres, par ce que l’estoc est plus meurtrier que le coup de taille, comme dit Vegece au liure 1. chap. 12.

Desgainer vne espée, Distringere, vel educere è vagina.

Ioüeur d’espée, Gladiator, Bustuarius.

Mettre l’espée au poing, Distringere gladium.

Se batre à espées rabatues, Rudibus pugnare. B. ex Cic.

Lors qu’vn chacun mette l’espée au poing, qu’on les voye en l’air, Tum micent gladij.


Ceindre vne espée à son costé comme il appartient, Ensem lateri vel ad latus accomodare.

Qui porte vne espée, Machaerophorus.

Il a son espée au costé, Latus succinctum gladio habet. Liuius. lib. 23.

Combatre à espée & dague, Certare spatha ac semispatha, ex Vegetio, lib. 2. c. 15.

Mettre à sac & à l’espée, c’est butiner & mettre à mort tout ce que le conquerant trouue en la ville par luy conquise, Conuasare ac ad Internecionem delere. Des Essars en sa traduction de Iosephe de la guerre des Iuifs, liur. 2. chap. 17. prindrent d’Emblée Massade, mettans à sac & à l’espée tous les Romains qu’ils trouuerent dedans.

Espée de cheualier, est vne façon d’espée bien acerée, de moyenne longeur, large & trenchat, dont les cheualiers receuans l’Ordre de cheualerie, estoiet ceints par ceux qui la leur donnoient, & qu’ils portoient de là en auant és combats à tout vn bauldrier pendu en escharpe, dont la poignée n’estoit gardée que d’vne croisée sans plus, seruant le gantelet pour armeure à la main. Gaguin au couronnement de Montioye premier Roy d’armes du Roy. Apres ces officiers d’armes, si l’esleu n’est cheualier, suyura vn cheualier tout seul, qui porter a vne espée de cheualier en son fourreau, la croix contremont, de laquelle il sera fait cheualier. On l’appelle aussi Espée d’armes, & Estoc d’armes.

Espée hunisque, est comme vn badelaire, en façon de Cimeterre Turcois, vne telle fut enuoyée par Charlemaigne à Offlas Roy Merciorum, comme dit la lettre dudit Charlemaigne escrite audit Roy Offlas, rapportée par Mathieu de Westmonstier en son Flores historiarum, en ces mots, Vestraeque dilectioni vnum baltheum, & vnum gladium huniscum, Et duo pallia serica duximus destinanda. S’il ne doibt toutesfois dire, Hunniscum, ab Hunnis, ou Thuniscum.

Ceindre l’espée à vn nouueau cheualier, Latus nouitij Equitis gladio succingere. Ex Liu. lib. 23.

Espeller, act. acut. Tantost est composé de Es prepos. priuatiue, & Peller, qui vient de Pellis, & non de Pilus Latin, & signifie escorcher, oster ou arracher la peau ou l’escorce, Corticem seu pellem detrahere, Cortice seu pelle nudare. Tantost est vn verbe corrompu de la mignardise de la prononciation du vulgaire, pour Appeller, & le conuiendroit escrire Eppeller, car les Latins dient Appellare literas, (qui est le terme du precepteur qui monstre à lire aux enfants) c’est à dire, nommer chasque lettre par son nom pour en faire vne syllabe. Et ainsi en vse Quintilien.

Espeller, Ordinare syllabarum literas, Coagmentare syllabas, voyez Appeller.

Espellement des syllabes, Coagmentum syllabarum.

Esperdu, Homo abiecto animo, Confusus, Attonitus, Consternatus.

Deuenir esperdu & defaillir de peur, Obtorpere.

Esperdu de peur, Exanimatum esse, Obstupere, Consternatum esse, vel Consternari animo.

Esperdument, Aduerb. Pasquier, Attonitè.

Esperer, Adduci in spem, Confidere, Sperare, In spe esse, Spe niti.

Esperer quelque chose, Habere aliquid in spe.

Esperer fort bien de quelque chose, In optima spe sibi ponere aliquid.

Esperer & s’attendre d’auoir la guerre, Praesumere spe bellum.

N’esperer que tout bien de quelque chose, Bene sperare de re aliqua.

N’esperer plus, Desperare, Spem relinquere, vel abiicere, Missam facere.

Chose qu’on ne pourroit esperer, Insperabilis.

Commencer à esperer, Ingredi in spem.

Il est fort esperé & attendu, Est in magna spe.

¶ I’espere que, &c. Inducor in spem vt, &c.

I’espere que tu viendras de brief, In spem adducor te mox affore.

Il fera mieux qu’on n’espere, Officio vincet omnes spes.

De qui on esperoit & auoit on grande attente qu’il paruiendroit à grande dignité, Ad summam dignitatem expectatus.

Qu’on n’esperoit point, Insperatus, Inopinatus.

Sans qu’on esperast ainsi, Contra spem.

Esperance de bien, Spes.

Certaine esperance, Spes quae in manibus habetur, Spes non dubia.

Faulse esperance, Fallax spes.

Plus grande esperance, Huberior spes.

Ils nous annonçoyent qu’il y auoit grande esperance que Antoine quitteroit, Summam spem nuntiabant fore vt Antonius cederet.

Hautaine esperance, Audax spes.

Petite esperance, Exigua spes, Spes tenuis, Specula.

Fort petite esperance, Pertenuis spes.

Pure & vraye esperance, Mera spes.

L’esperance s’escoule & se passe, Fluit spes.

En esperance d’auoirtout le pillage & la despoüille ils passent outre le fleuue, In spem vniuersae praedae traiiciunt flumen.

L’esperance que les iuges donnans leurs opinions par ballotes, & non


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