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les parties de mon Empire. Je ne me laſſois point d’admirer, j’étois dans une agitation cruelle. Je mis toute ma Cour en mouvement, je donnai la torture à tout le monde, je culbutai tous les magaſins pour trouver une explication ſatisfaiſante, & une inſtruction qui me donna quelque repos. A force de travailler ſans ſuccès, la triſteſſe & l’ennui me ſubjuguérent, le découragement affoiblit l’attention de mes ſentimens, les efforts de mes Miniſtres les plus raiſonnables cedérent à ma langueur. On auroit dit que mon ame ſouffroit de ne pouvoir s’expliquer, & de m’être ſi long-tems inutile. Je tombai dans un abattement dangereux, ma ſanté ſe revolta contre la violence que je me faiſois, & les contradictions que j’avois à eſſuyer.

Ce ne fut point l’aveugle hazard qui adoucit mon tourment. Un génie bienfaiſant conduiſoit ſans doute un domeſtique de confiance, qui quoique de même âge que moi, m’inſtruiſit enfin de la route des plaiſirs que j’ignorois, fixa mon ame incertaine, & débroüilla mes idées, de manière que les