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jours couverts, comme si le soleil perçant les nuées brillât timidement çà et là sur les versants. Le trois ou quatre mai je vis un plongeon dans l’étang, et durant la première semaine du mois j’entendis le whip-pour-will, la grive rousse, la litorne, le moucherolle verdâtre, le chewink et autres oiseaux. J’avais entendu depuis longtemps la grive des bois. Le moucherolle brun, une fois encore déjà revenu, avait jeté un regard par ma porte et ma fenêtre, pour voir si ma maison était assez caverne pour lui, se tenant suspendu sur ses ailes bourdonnantes les griffes recourbées, comme s’il s’agrippait à l’air, tout en faisant l’inspection des lieux ; le pollen-soufre du pitchpin bientôt saupoudra l’étang et les pierres et le bois pourri le long de la rive, au point qu’on eût pu en recueillir un plein baril. Ce sont les « pluies de soufre » dont on nous parle. Il n’est pas jusque dans le drame de Kâlidasa[1] : Sacontala, que nous ne voyions des ruisseaux teints en jaune par la poudre d’or du lotus. Et de la sorte les saisons allaient se déroulant en l’été, comme on flâne dans l’herbe de plus en plus haute.

Ainsi se compléta ma première année de vie dans les bois ; et la seconde lui fut semblable. Je quittai finalement Walden le six septembre 1847.

  1. Poète et dramaturge de l’Inde, réputé l’un des grands poètes du monde.