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l'attrait des plaisirs. Prince inconstant, capable en un seul jour des résolutions les plus contradictoires, inhabile par son âge, et ne pouvant que mal faire par ses conseillers, c’était sur lui pourtant que reposait la meilleure part des destinées de la France. Et voilà pourquoi le Livre de la Paix lui fut adressé jusqu’au bout, avec tous les conseils que la sagesse pouvait donner à l’héritier d’une grande couronne, surtout avec cette constante prévision, que la concorde intérieure était la première ou plutôt la seule garantie contre les invasions de l’étranger.

Il est beau de voir Christine livrée à cette préoccupation de la guerre étrangère qui anime tous ses écrits politiques. Elle y revient sans cesse ; et l’on dirait le bon génie de la France qui sonne l’alarme à tous les donjons de la société féodale, la seule qui eut encore le sentiment de la nationalité ; car l’esprit des bourgs et des campagnes, à peine relevé de la servitude, se trainait alors terre à terre, étranger à l’intelligence des intérêts généraux, et le menu peuple, tout entier au redressement des griefs de la corporation ou de la commune, plein des souvenirs de la jacquerie, rêvait contre les nobles des vengeances qu’une fille des