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du Dauphin, qu’on venait de retirer des mains des femmes et du pouvoir d’Isabelle. Le duc de Berry refusa en s’excusant, on ne sait pourquoi, sur son grand âge ; et sur-le-champ fut pris au mot par son neveu, le duc de Bourgogne, empressé d’accepter d’aussi importantes fonctions.

Plein de dépit d’avoir manqué la meilleure occasion de saisir le pouvoir qu’il convoitait, le vieillard oublie son rôle modérateur, quitte la cour sans prendre congé, et va rallumer dans le cœur des jeunes princes d’Orléans, la vengeance que n’avaient pu éteindre quelques paroles de réconciliation. Les factions parricides reprirent bientôt les armes ; et, le 23 août 1410, Christine, éplorée, épanchait ses douleurs en écrivant sa Lamentation.

« Ha ! France ! France ! s’écrie-t-elle, jadis glorieux royaume ! ne seras-tu pas acomparée de cy en avant aus estranges nacions, là où les frères germains, cousins et parens par faulse envie et convoitise s’entre-ocient comme chiens ? Ne diront-ilz en reprouchant : « Alez, alez, vous François, qui vous vantiez du doulz sang de vos princes, non tyrans ; et nous escharnissiez de nos