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sonnel que dans celui du bien public, ajoutant, avec une érudition aussi sobre que pleine d’à-propos, tout ce que l’expérience de l’histoire peut donner de force aux raisons suggérées par les circonstances. Elle dévoile en même temps l’avenir, et ses nobles pensées, sorties du cœur, deviennent autant de prophéties pour les destinées prochaines de la France.

« Hélas ! doncques, dit-elle à la Reine, qui seroit si dure mère qui peust souffrir, se elle n’avoit le cuer de pierre, veoir ses enfans entre-occire et espandre le sang l’un à l’autre, et leurs povres membres destruire et disperser ; et puist, qu’il venist par de costé estranges ennemis, qui du tout les persécutassent et saisissent leurs héritages.

« Et ainsi, très haute dame, povez estre certaine qu’avenist enfin de cette persécution, se la chose aloit plus avant, que Dieu ne vueille. Car n’est mie doubte que les ennemis du royaume, resjouiz de ceste aventure, viendroient par de costé à grant armée pour tout parhonnir. Ha Dieu ! quel douleur à si noble royaume perdre et périr tel chevalerie ! Hélas ! et qu’il convenist que le povre peuple com- parast le péchié dont il est innocent ! et que les povres petits alaittans et enfans criassent