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que la Reine envoyait en Bavière une partie du trésor public. Mais quelque faux et même absurde que fût ce bruit, de quoi n’étaient pas capables ceux qui, au milieu des plus folles dissipations de la cour, laissaient le monarque, malade, privé des soins les plus nécessaires et livré à tous les accès de sa démence, pourrir dans ses vêtemens infects, sans qu’on songeât même à le changer de linge et à l’entretenir au moins dans la santé du corps. Ces détails, qui soulèvent le cœur, sont l’image la plus fidèle de cette abominable époque. Jamais la royauté n’avait été plus avilie, jamais, si ce n’est en des circonstances bien différentes, et dans les cachots du Temple, lorsque le fils de Louis XVI était livré au plus ignoble bourreau. Étrange contradiction ! les nobles seigneurs du XIVe siècle dégradaient comme à plaisir cette même monarchie que leurs fils devaient défendre, tandis que le pauvre peuple, qui, lui aussi, devait changer de rôle, donnait alors, comme au meilleur compagnon de son infortune, le surnom de Bien-Aimé au malheureux Charles VI.

Telle était la conduite et la situation des partis lorsque ce Roi recouvra un instant la santé, vit l’indigne oubli où on l’abandonnait, et profi-