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honorable armée, au mains jusques à ce que ans parties ayes parlé. Si l’en viens à Paris, en la cité ton père, où tu nasquis, qui a toy crie en lermes, soupirs et pleurs et te demande et requiert. Vien tost reconforter la cité adolée, et te avance avec la langue de correccion vers tes enfans, se tu les vois mesprendre, si comme bon père, et les pacifie en les reprenant, si que tu doiz et bien t’appartient : leur enseignant raisons d’une partie et d’autre comment, quel que soit leur descord, eulx, qui doivent estre pillîers, deffense et sousteneurs de la noble couronne, et larges du royaume qui onques ne leur meffist ne ne doit comparer ce que ilz s’entre-demandent, ne le vueillent destruire.

Et pour Dieu ! pour Dieu ! noble duc, vueillez tost advertir, que quoy que par divers langages soit à présent devisé en chacune partie, espérant de la victoire pour soy de la bataille, en disant : Nous vaincrons et ainsi ouvrerons, que trop est fole la vantise ! Car ne doit estre ignorée comme estrange, et non cognene est la fortune de toute bataille. Car quoy que de homme soit proposé, fortune y dispose. Et que valut jadis au roy de Thèbes soy partir vainqueur de la bataille, lui III° sans plus de chevaliers et touz les siens mors laissiez ou champ, gisans avec la multitude de ses ennemis désimé par glaives de ses parens et princes ? Diex ! quel victoire trop fu douleureuse ! Le roy d’Athènes navré à mort en bataille, que lui valu sa victoire ? ne que prouffite en tel cas multitude de gens ? Ne fu Xercès desconfit, qui tant en avoit que vaulx et mons touz couvers en estoient ? Bon droit et juste querelle vault-elle donques ?