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simplement l’impuissance de résister à une force plus grande, ou l’absence de faculté et de pouvoir, qui entraîne la nécessité de subir le mouvement[1]. Donc où il y aurait non seulement énergie entravée et activité combattue, mais bien privation complète d’énergie et d’activité, il n’y aurait pas de faculté passive, il n’y aurait que le néant. Nous pouvons remarquer cependant, au sujet de la force motrice, qu’elle a spécialement sa cause dans les esprits et cela pour deux raisons. La première, c’est que ces esprits sont formés, comme nous l’avons remarqué plusieurs fois, des atomes les plus actifs ; la seconde, c’est qu’au moment où les corps se dissolvent et où ces atomes s’échappent et recouvrent leur liberté, la faculté disparait.

On s’est demandé si toutes les facultés étaient innées ou acquises. Il est évident que certaines d’entre elles sont innées ; telles sont celles qui se trouvent dans les êtres vivants, les plantes et les animaux : comme la faculté nutritive, procréatrice, etc. Il est évident également qu’elles se développent avec les années et se fortifient. — Au contraire plusieurs des facultés qui se trouvent dans les corps inanimés paraissent acquises : telles sont la vertu d’échauffer et celle d’éclairer, par exemple. Ainsi la vertu d’échauffer qu’on dit résider dans le fer, ne lui appartient certainement pas en propre ; elle appartient au feu qui est entré dans ses pores. C’est pourquoi, si les atomes de feu sont chassés, la faculté d’échauffer n’existe plus. En résumé, la faculté considérée dans les choses « est de sa nature substantielle, elle est une portion des éléments qui par suite de leur mobilité, de leur forme, de leur contexture, deviennent le principe de l’action et du mouvement[2] » ; en outre, comme ces éléments. sont différents, comme leur disposition peut être indéfiniment variée, il en résulte qu’ils forment des facultés diffé-

  1. « Inde sequitur nullam proprie esse facultatem nisi activam, quoniam tametsi rerum motus idem cum actione et passione sit, sui tamen principium in solo movente seu agenle habet. Neque obstat, quod dicatur quoque passiva facultas seu potentia dari, siquidem hæc proprie nihil aliud est quam resistendi impotentia, sive privatio facultatis, cujus defectu obedire, seu subire motum cogatur. » (I, p. 385.)
  2. « Facultas quidpiam substantiale, portio scilicet principiorum quæ, pro sua mobilitate, proque conditione molis, figuræ contexturæque in corpora, sunt incertæ actionis principium. » (Id., p. 386.)