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Mais M. Dumont s’éloigna rapidement pour ne pas l’entendre.

Cet arrêt fit une telle impression sur Gustave, qu’il tomba malade et dut garder le lit pendant plusieurs semaines.

M. Dumont, inquiet, ne le quittait pas, sauf lorsque ses hommes réclamaient ses ordres. Durant ces absences, notre jeune homme donnait libre cours à ses pensées et les larmes venaient alors inonder son oreiller.

— Dans trois mois, se répétait-il souvent, j’aurai vingt ans, et j’ai promis d’aller voir mes bons vieux parents à Montréal. Comment remplir ma promesse ? me voici cloué sur mon lit par la maladie ; Dieu seul sait quand je serai en état de me lever, et lorsque je serai mieux, mon père ne voudra peut-être pas partir d’ici.

Une autre fois, il se disait :

— Je veux cependant tenir ma promesse, si Dieu me conserve la vie. Je n’ai pas vu ma mère et ma sœur depuis un an. Comment sont-elles en ce moment ? Qu’il est donc triste de vivre ainsi éloignés les uns des autres ! Comme tout serait facile à arranger si mon père le voulait ; nous irions tous deux à Saint-Louis d’abord voir maman et ma sœur, puis tous ensemble nous irions à Montréal. Quelle joie pour ces bons vieillards ! Quel bonheur pour ma mère et ma sœur ! Quelle grande faveur pour moi ! Mais, non, je n’ose y penser, Dieu me rendrait trop heureux.

Ces pensées, trop fortes pour son état, l’affaiblirent à un tel point, qu’une fièvre violente s’empara de lui et il fut comme frappé de délire.

M. Dumont, effrayé, court chez le médecin du régiment, et revient en toute hâte avec lui.

Ils entrent et entendent Gustave dire d’une voix faible :

— Ah ! mon Dieu, permettez donc que mon père, si bon d’ailleurs, revienne à vous et à la sainte Église qu’il