— Et cet unique moyen de salut est bien aisé, je suppose ?
— Rien de plus aisé, tous peuvent lire la Bible ou la faire lire.
— Est-il aussi aisé de la comprendre ?
— Oh ! oui, presque toujours.
— Je le nie ; il arrive même qu’on ne la comprend pas du tout. Donc la Bible n’est pas, pour la plupart des hommes, un moyen sûr de connaître la vérité.
— Que peut-il y avoir de plus sûr que la parole de Dieu ?
— Rien de plus sûr pour celui qui la comprend ; mais ils sont rares ceux qui la comprennent. Dites-moi, quelle sûreté peut avoir un homme, quand il voit son voisin qui, lisant la Bible comme lui, diffère et soutient une opinion contraire à la sienne ?
— Tous ceux qui lisent la Bible avec sincérité s’accordent sur tout ce qu’il y a d’essentiel au salut.
— Je vais tout de suite vous prouver le contraire. Toutes les autorités de l’Église catholique n’en laissent pas l’interprétation aux fidèles ; cependant, comme je sais d’avance que vous n’accepterez pas leur témoignage, je vais vous citer des autorités protestantes. Voici ce que dit le célèbre protestant Grotius :
Les apôtres n’ont pas eu l’intention d’exposer tout au long dans leurs épîtres les doctrines nécessaires au salut : ils les écrivaient occasionnellement au sujet de questions qui se présentaient à eux.
Lessing dit :
Le christianisme était déjà répandu avant qu’aucun des évangélistes se mît à écrire la vie de Jésus.
Écoutez Luther maintenant. Voici ce qu’il dit :
Approfondir le sens des Écritures est chose impossible ; nous ne prouvons qu’en effleurer la superficie ; en comprendre le sens serait merveille. Que les théologiens disent et fassent tout ce qu’ils voudront, pénétrer le sens, le mystère de la parole divine sera toujours une entreprise au-dessus de notre intelligence. Ses sentences sont