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— Mais, papa, il y a deux mois que je suis avec vous, et vous ne m’avez pas empêché de…

— Le fait de l’avoir toléré jusqu’à présent, dit M. Dumont en l’interrompant, ne m’oblige pas à le tolérer davantage ; je manquerais à mon devoir de père si je te laissais pratiquer un acte d’idolâtrie ; c’est un grand mal.

— Un mal, dites-vous ? pourrais-je vous demander, cher père, sur quoi ou sur quelle autorité vous vous appuyez pour prouver votre assertion ?

— Je m’appuie sur la Bible, et sur l’usage des premiers chrétiens, qui n’ont jamais pratiqué de folies semblables.

— Des folies semblables ! répète Gustave, veuillez donc me dire où est la folie dans un acte qui représente la passion de Notre-Seigneur par un signe, un acte qui par les paroles que nous répétons, nous prévient de faire toutes nos actions au nom de Dieu le Père, notre créateur, de Dieu le Fils, notre Rédempteur, de Dieu le Saint-Esprit qui nous a sanctifiés. Vous me pardonnerez si je me permets de vous dire que je suis vraiment surpris de vous entendre vous appuyer en cela sur la Bible et sur l’usage des premiers chrétiens : c’est une erreur !…

— Ce n’est pas une erreur, cet acte n’a jamais été pratiqué par les premiers chrétiens ; il n’en est pas fait mention dans la Bible, et les glorieux pères du protestantisme le condamnèrent comme étant une invention romaine, un signe d’hypocrisie en tout point semblable à ceux que les païens font pendant leurs cérémonies.

— Il me semble, intervint madame Dumont, qu’il vaudrait mieux attendre que Gustave fût assez âgé pour juger par lui-même, avant de lui interdire des actes qu’il considère comme bons. Je suis loin de les approuver, mais laisse-le grandir et étudier, et je n’ai pas le moindre doute qu’il ne dédaigne et regrette ces erreurs.