Page:Thomas - Gustave ou Un héros Canadien, 1901.djvu/200

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
200
gustave

fuyant avec une grande rapidité à quelques centaines de pieds de lui seulement.

Ce premier danger passé, une rafale de vent le renverse par terre ; il s’empresse de se relever et, jetant la vue au ciel, il voit le spectacle le plus grandiose et le plus terrible à la fois.

La tempête s’approche, les éléments paraissent se livrer une bataille de géants ; le firmament est tout en feu ; aussi loin que sa vue peut s’étendre dans cette immense prairie, il ne voit que de gros nuages ressemblant à des spectres monstrueux et horribles, qui avancent avec une rapidité effrayante ; dans leur course effrénée, ils se croisent, se roulent et se bousculent les uns les autres ; les plus petits, forcés de livrer passage, s’élèvent ou s’abaissent pour se réunir à d’autres, et se lancent de nouveau pour recommencer la bataille.

Les éclairs qui ne cessent de traverser les airs en serpentant et en frappant la prairie dans toutes les directions, paraissent comme autant de projectiles dont se servent les ennemis pour s’anéantir mutuellement.

La grande voix du tonnerre se fait entendre de plus en plus menaçante ; alors le vent s’agite avec un surcroît de fureur, les nuages, comme effrayés, redoublent de vitesse. Irritée, cette voix résonne plus forte comme pour leur dire : « Vous ne faites pas ce que je veux » ; les nuages obéissent, ils se crèvent et l’eau tombe par torrents, mais le vent, toujours déchaîné, s’enfuit pour renouveler ses dégâts plus loin.

Appuyé sur sa carabine, Gustave ne peut détacher la vue de ce spectacle.

— Mon Dieu, dit-il, que vos œuvres sont admirables et grandioses ; quelle majesté et quelle puissance vous déployez dans ces éléments qui vous obéissent.

Absorbé dans ses réflexions, il n’avait pas entendu les cris de peur lancés par les gens de notre caravane,