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par Mallarmé. De même certaines pages d’une intéressante Psychologie de la nature morte, de M. Mauclair, nous rendent sans doute un écho de sa conversation.

Il applique dans ses sonnets le secret de son art dernier à reconstruire sans les nommer, à suggérer des coupes de verre, des éventails. Le sonnet Ses purs ongles est une copie — d’une technique très curieuse — de son salon la nuit. L’Angoisse ici symbolisée était vraiment un bronze lampadophore.

Voyez dans ie sonnet,

Tout orgueil fume-t-il d’un soir...

la concentration des Figures dans la Nuit. Le poète, le soir, à son feu qui s’éteint, dans sa chambre obscure, mystère de peine, de froid, d’attente. La chambre serait malaisément prête à la visite sublime, à l’inspiration, rare hélas ! à la figure survenue du Poète changé en lui-même par l’éternité, « hoir »

De maint riche, mais chu trophée.

Et voici que le marbre de la console, par les lueurs d’or que le feu mourant allume au métal du meuble, pris d’en bas en d’inflexibles serres, figure un Tombeau. De sorte que le motif familier du meuble se transforme en l’autre motif familier du tombeau, par le moyen terme du froid, — feu froid de reflet, de solitude et de pensée vaine.

Sous ce marbre lourd qu’elle isole,
Ne s’allume pas d’autre feu
Que la fulgurante console.

Ses sonnets d’amour disent de coutume la douceur de chambres closes.

Au sonnet

Quelle soie aux baumes de temps

on pourrait donner un argument comme celui des ode-