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étymologique, est là pour indiquer, dès l’abord, l’ambition vaine de l’œuvre suprême. La poésie pure est hyperbolique, comme le doute premier de Descartes est dit par lui hyperbolique : idéal jeté au delà de toute possibilité pratique. L’art poétique que Mallarmé va indiquer est analogue à cette esthétique théâtrale, dont le sujet est « le Monstre — Qui ne peut être ».

De ma mémoire. Poésie artificielle, que cet art des derniers jours. Elle est faite de souvenirs, d’humanité ancienne et raffinée, de tout ce qui se précisera tout à l’heure dans l’évocation du décor byzantin.

Triomphalement. L’adverbe bien situé est, quoiqu’on dise Molière d’un bel effet.

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Un navire y passait majestueusement.

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Étalé ici dans le frêle octosyllabe comme sur un pupitre ajouré, il se développe avec l’ampleur et l’autorité même du vaste livre.

Te lever aujourd’hui grimoire. Le vœu de toute son existence : te réaliser dans un livre, dans le Livre. Pour désigner le livre, grimoire, chez Mallarmé, revient plusieurs fois. Peut-être, avec cet arrière fond d’ironie qui lui a suggéré le titre de Divagations, admet-il bienveillamment le terme même dont un lecteur déçu qualifie son œuvre.

Dans un livre de fer vêtu : le livre idéal s’imposant définitif, comme la machine des derniers jours, œuvre de l’art et œuvre de vie.

Stance II. — La deuxième stance épanouit et éclaircit la première (Car...) Cette poésie nouvelle, c’est une œuvre de science, de volonté, de technique. Elle implique « le labeur de linguistique par lequel saigne de s’interrompre » une noble faculté poétique, mais qui est la condition de cette faculté.

L’hymne des cœurs spirituels. Cœurs byzantins, ou crus tels, qui résolvent toute flamme et toute vie en culture, en intelligence, en sensation voluptueuse et raffinée. Sujet du livre dernier, pour une humanité cons-