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Car j’installe, par la science,
L’hymne des cœurs spirituels
En l’œuvre de ma patience,
Atlas, herbiers et rituels.

Nous promenions notre visage
(Nous fûmes deux, je le maintiens)
Sur maint charme de paysage,
O sœur, y comparant les tiens.

L’ère d’autorité se trouble
Lorsque, sans nul motif, on dit
De ce midi que notre double
Inconscience approfondit

Que, sol des cent iris, son site,
Ils savent s’il a bien été,
Ne porte pas de nom que cite
L’or de la trompette d’été.

Oui, dans une île que l’air charge
De vue et non de visions,
Toute fleur s’étalait plus large
Sans que nous en devisions.

Telles, immenses, que chacune
Ordinairement se para
D’un lucide contour, lacune,
Qui des jardins les sépara.

Gloire du long désir, Idées !
Tout en moi s’exaltait de voir
La famille des iridées
Surgir à ce nouveau devoir.

Mais cette sœur sensée et tendre
Ne porta son regard plus loin
Que sourire, et comme à l’entendre
J’occupe mon antique soin.

Oh ! sache l’Esprit de litige,
A cette heure où nous nous taisons,