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CHAPITRE PREMIER

HERODIADE

Si Mallarmé renonça à tout art facile, spontané, de plain-pied, il n’en distinguait pas moins, dans la gloire qu’il imaginait, des degrés, et, dans le public autour d’elle formé, des zones. Pour s’assurer un petit coin de l’anthologie commune, il comptait, je crois, sur Hérodiade. Il ne la considéra que comme fragment, et lui rêva toujours une suite. L’édition complète est, à la première page de Divagations, annoncée « sous presse ». Les notes des Poésies nous apprennent qu’elle « comporte outre le cantique de Saint Jean et sa conclusion en un dernier monologue, des Prélude et Finale qui seront ultérieurement publiés, et s’arrange en poème ». Et, cette année 1926, en même temps que cette seconde édition de mon livre, en paraît une version ancienne.

Hérodiade est probablement le seul poème de Mallarmé qui ait passé dans la circulation poétique et qui ait exercé une influence[1]. Elle forme un des liens les plus authentiques entre le Parnasse et le symbolisme.

Elle fut écrite, paraît-il, postérieurement à L’Après-Midi d’un Faune. Mais il semble que cet ordre du

  1. C’était vrai en 1911, quand j’écrivais ce livre. Mais la jeune littérature d’aujourd’hui subit fortement l’influence du dernier ouvrage de Mallarmé, Un Coup de Dés.