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CHAPITRE XIII

LA LOGIQUE

De cette vie intérieure, des tendances poétiques auxquelles elle donne et dont elle reçoit naissance, doit procéder l’habitude systématisée de l’esprit que l’on appelle une logique. Habitude systématisée, et non système enregistré par l’esprit. Ne voyons pas dans l’art de Mallarmé une entreprise et un dessein délibérés, mais dans cette conception délibérée le couronnement de son art. Action et réaction d’ailleurs s’impliquent, et de la cause à l’effet la différence est surtout d’accent.

Quand on observe qu’impressionniste il fut épris de logique, on doit, pour ne pas s’en étonner, se souvenir que les impressionnistes eux aussi furent des peintres logiciens. Plus l’effort s’accentue pour retrouver directe, originelle, l’impression momentanée, plus devient nécessaire l’invention qui par des moyens logiques mettra dans les impressions un ordre. La finesse des sens, qui rend vaines les conventions d’une logique ancienne, ne peut faire œuvre créatrice que si, pour harmoniser des impressions fraîches, apparaît, inspirée d’elles et comme déposée par elles, une logique nouvelle.

Dans toute succession d’états internes, il y a logique. Le hasard pur — au sens où Mallarmé prenait ce mot