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Sixième : Les sept Lorrains se présentent à Napoléon. — Bouteiller, chez le baron de Reinach, présenté aux parlementaires.

Septième : La mystérieuse soirée de Billancourt (Astiné et les deux assassins). — La promenade de printemps et d’amour de Sturel et Thérèse : les deux groupes se croisent.

Huitième : La mort d’Astiné. — La mort de Victor Hugo : les perplexités de Sturel qui ne sait laquelle de ces deux morts doit le plus l’intéresser.

Neuvième : Déraciné, Décapité.

Dixième : Racadot guillotiné à Paris. — Bouteiller élu, à Nancy. Bouteiller trouvant auprès du baron de Reinach les cinquante mille francs de sa campagne, tandis que les turquoises des princes persans mènent Racadot à l’échafaud.

Les Déracinés comme tous les romans de M. Barrès appartiennent au genre de récit où l’auteur intervient sans cesse, prend la parole, désigne, explique, démonte. C’est un parti-pris qui peut se défendre, et M. Bourget l’a en effet défendu avec ingéniosité dans ses essais théoriques sur le roman. Mais certainement M. Barrès l’a exagéré. Il serait intéressant de voir le moi de l’homme introduit dans le roman, il l’est moins de voir s’agiter sans cesse comme devant un tableau noir la baguette explicative du romancier. Tout ce chapitre : La mystérieuse soirée de Billancourt, est bousculé par le commentaire perpétuel. Ce sont des pages et des pages de cantilènes éperdues, abstraites ou imagées, sur l’assassinat, sur le tragique de l’assassinat, — de l’imagination congelée — le « geste » des journalistes, une insistance de mauvais goût sur le typisme, le symbolisme des personnages, comme si moi lecteur je n’étais pas assez grand garçon pour les découvrir tout seul, comme si le doigt qui le touche pour le montrer ne l’effaçait pas ainsi qu’un pastel fragile. « Et sur ces mêmes arbres, sur ce même sable qui crie, la fuite des assassins emportant une belle tête sanglante, des perles et des turquoises »[1].

Le livre est touffu, il porte des paquets de notes, des épisodes peu utiles et mal digérés. Mais tout est relevé, animé, emporté par la vie très réelle, quasi balzacienne, des personnages. Les sept Lorrains, la Léontine, Fanfournot, sont des créations authentiques, des caractères, qui se détachent et qui se meuvent. Et puis M. Barrès sait raconter. Certaines narrations, le débarquement de Rœmerspacher

  1. Les Déracinés, p. 407.