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fausse érudition, que nous avons déjà signalé, rien n’est moins fondé que cette virulente attaque. Au lieu d’exploiter, Thevet fut, au contraire, et cela toute sa vie, plus qu’exploité : volé. Comme il avait beaucoup voyagé, beaucoup vu et beaucoup retenu, et que, de plus, il était d’une inépuisable complaisance, les écrivains du temps faisaient volontiers appel à ses souvenirs ; mais, s’ils aimaient à se servir de lui, ils ne lui rendaient que rarement justice. Lui qui, quoique en dise de Thou, poussait jusqu’au scrupule la délicatesse littéraire[1], lui qui citait toujours avec empressement ses autorités, combien de fois fut-il indignement pillé ! De temps à autres il en riait, et se moquait de ceux qui profitaient de ses labeurs « soubs prétexte de mêdicité et repues franches[2], » mais le plus souvent il s’en indignait. Sur la fin de sa vie il était tellement habitué à ces plagiats qu’il s’étonnait naïvement quand, par hasard, on le citait : « J’en

  1. Jean de Bray, échevin, lui ayant communiqué sa collection de médailles, il a grand soin de l’indiquer, et ajoute : « Et si d’aduenture il y a quelques-uns qui ayent des mémoires de l’antiquité de leurs villes on autres choses étrangères, il leur plaise m’en faire part pour insérer en ce mien œuvre à la seconde impression : ie ne seroy ingrat de le recognoistre par mes escrits. » Préface de la Cosmographie universelle.
  2. Cosmographie, I, 403.