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nommez, se cherchent souuent les uns les autres, et se battent autant furieusement qu’il est possible. Ce que les contraint d’une part et d’autre de se fortifier de gens et armes chacun village. Ils s’assemblerôt de nuit en grand nôbre pour faire le guet : car ils sont coustumiers de se surprendre plus de nuit que de iour. Chaussetrapes des Sauuages. Si aucunes fois ils sont aduertis, ou autrement se soupsonnent de la venue de leurs ennemis, ils vous planterôt en terre tout autour de leurs tugures, loing d’un trait d’arc, une infinité de cheuilles de bois fort agues[1], de maniere que le bout qui sort hors de terre estant fort agu, ne se voit que bien peu : ce que ie ne puis mieux côparer qu’aux chaussetrapes dot l’ô use par deça : à fin que les ennemis se percent les pieds, qui sot nuds, ainsi que le reste du corps : et par ce moyê les puissent saccager, c’est assauoir tuer les uns, les autres emmener prisonniers. C’est un tresgrâd hôneur à eux lesquels partans de leur païs pour aller assaillir les autres sur leurs frontieres, et quand ils amenent plusieurs de leurs ennemis prisonniers en leurs païs : aussi est il celebré, et honnoré des autres, comme un Roy et grand Seigneur qui en

  1. Léry. § xiv. « Alentour de quelques villages frontiers des ennemis, les mieux aguerris plantent des paux de palmier de cinq ou six pieds de haut : et encores sur les aduenues des chemins en tournoyant, ils fichent des cheuilles pointues à fleur de terre ; tellement que si les assaillans pensent entrer de nuict ceux de dedans qui sauent les destroits par où ils peuvent aller sans s’offenser, sortans dessus, les rembarrent de telle façon qu’il en demeure touiours quelques uns sur la place, desquels les autres font des carbonades. » Cf. Thevet. Cosm. Univ. P. 941. Hans Staden. P. 237.