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quelque sucre[1] : mais ils s’y tiennêt pour traffiquer auec les Barbares, et Ethiopiens : c’est à sçauoir, d’or fondu, perles, musc, rhubarbe, casse, bestes, oyseaux, et autres choses selon le païs. Aussi sont en ces isles les saisons[2] du temps fort inegalles et differentes des autres païs : les personnes subiettes beaucoup plus à maladies que ceux du Septentrion. Laquelle difference et inequalitaté viêt du Soleil, lequel nous cômunique ses qualitez par l’air estant entre luy et nous. Il passe (comme chacû entend) deux fois l’année perpendiculairement par là, et lors descrit nostre Equinoctial, c’est asçauoir au moys de Mars et de Septembre. Abondâce de diuers poissôs soubs la ligne. Enuiron ceste ligne il se trouue telle abondance de poissons[3], de plusieurs et diuer ses especes, que cest chose merueilleuse de les voir sus l’eau, et

  1. La culture du sucre était jadis très-florissante à St-Thomas. Dès le XVIe siècle, on y comptait plus de quatre-vingts sucreries, produisant plus de deux millions de kil. de sucre. La canne avait été apportée de Madère. Sa culture fut malheureusement abandonnée au XVIIe siècle, et n’a pas repris depuis.
  2. On ne connaît dans l’archipel que deux saisons, celle des ouragans (das ventanias) d’août à septembre, et celle des pluies (das aguas), qui règne de l’équinoxe de septembre aux derniers jours de mars. La première est salubre ; dans la seconde au contraire, le sol exhale des miasmes délétères, funestes à la santé des habitants et surtout à celles des Européens, qui n’en sont que trop souvent les victimes. Voir D’Avezac. Iles de l’Afrique. P. 223.
  3. La mer ambiante, aujourd’hui encore, est tellement féconde in poissons de toute sorte que les baies et les criques en sont remplies, et qu’une chaloupe montée par six hommes peut en quelques heures prendre plusieurs quintaux de poisson. Cette pêche n’est pas sans danger à cause d’énormes requins dont la voracité ne recule pas devant l’attaque des chaloupes.